Entretien avec Astrid Belfer, fondatrice de DoggyWorky : « Nous sommes convaincus que les chiens sont compatibles avec le milieu professionnel »
Et si vous pouviez emmener votre fidèle compagnon à 4 pattes sur votre lieu de travail ? Chez Woopets, nous sommes plusieurs collaborateurs à venir au bureau avec nos toutous ! DoggyWorky est la première entreprise française dédiée au « dog-at-work » encadré et sécurisé. Astrid Belfer, fondatrice de DoggyWorky et heureuse propriétaire d’un Berger Australien nommé Roucky, nous en dit plus sur cette démarche au poil.
1. Qu’est-ce qui vous a inspiré la création de DoggyWorky ?
Ingénieure spécialisée en management des risques, je travaillais sur des tunnels. Après une longue phase d’arrêt maladie, j’ai voulu retourner au travail avec mon chien, car il atténuait les facteurs qui rendaient compliqué mon retour. Je me suis confrontée à la réalité du milieu professionnel, qui estimait que le dog-at-work était « trop dangereux ». Pour réapprécier le niveau de dangerosité, je me suis mise à la place de l’employeur : qu’est-ce qui l’inquiétait et pouvait le rassurer ?
J’ai repris la norme ISO associée au management des risques et les obligations légales point par point. Le Code du travail ne contient qu’un texte de loi rappelant l’obligation légale de l’employeur d’assurer la santé et la sécurité de ses collaborateurs sur le lieu de travail. Des mesures doivent donc être mises en place. Je suis allée voir l’inspection du travail, la Carsat, la Caisse primaire d’assurance maladie, ou encore la médecine du travail pour comprendre - et répondre à leurs interrogations.
Par la suite, j’ai présenté les résultats à mon employeur et mis à jour un document très important en entreprise qui évalue tous les risques professionnels. C’est ainsi que je l’ai convaincu.
J’ai pu aller au travail avec Roucky, et bénéficier de ses bienfaits. 2 mois après, il y a eu un sondage IPSO (juin 2023) révélant que 62 % des propriétaires veulent aller au travail avec leur chien. Contrairement à ce que je pensais, il y avait un vide dans l’accompagnement du dog-at-work, raison pour laquelle j’ai lancé DoggyWorky.
2. Quels sont les bienfaits de la présence d’un chien sur le lieu de travail ?
Tout d’abord, il y a une amélioration du bien-être. Des études scientifiques ont prouvé que la présence d’un chien avait un effet sur la baisse de la tension artérielle et le taux de cortisol. Le stress est l’un des premiers facteurs de détresse psychologique dans le monde du travail. Un salarié sur deux se dit en détresse psychologique.
Le chien est aussi un catalyseur social. Il permet de créer du lien avec ses collaborateurs, mais aussi sa hiérarchie. Aux États-Unis, une étude HABRI – Humane Animal Behavior Relationship International – stipule que 98 % des salariés constatent une amélioration de la santé mentale avec le dog-at-work.
De même, de réels bienfaits sont notés pour l’employeur avec une augmentation de la productivité des salariés et une baisse de l’absentéisme. L’étude indique que le nombre d’arrêts de travail diminue de 8 % en moyenne dans les entreprises mettant en place le dog-at-work. Par ailleurs, il est prouvé qu’une entreprise engagée dans le bien-être de ses salariés et des animaux a un plus grand rayonnement auprès des collaborateurs, mais aussi des clients.
Ajoutons à cela l’attractivité en recrutement. En France, le dog-at-work est le 5e argument de recrutement pour les personnes de moins de 35 ans, qui sont souvent les plus soumises à la détresse psychologique.
Le dernier point important concerne les bienfaits pour le chien. À condition de s’assurer qu’il est compatible à l’environnement professionnel ! Voir d’autres personnes et des congénères contribue, par exemple, à sa sociabilisation.
© DoggyWorky
3. Quelles sont les dispositions légales ? Pourquoi est-il important de bien encadrer la démarche ?
Selon l’article L4121-1 du Code du travail, l’employeur a l’obligation légale d’assurer la santé et la sécurité de ses collaborateurs sur le lieu de travail. Des mesures de prévention obligatoires sont à instaurer : il faut communiquer et former.
L’employeur doit mettre à jour un document unique d’évaluation des risques professionnels. Selon le Code du travail, chaque risque manquant représente une sanction pénale et/ou civile auprès de l’employeur. Avec un chien, nous imaginons tout de suite la morsure. Mais il y a beaucoup d’autres choses ! Un jouet qui traîne par terre, par exemple, entraîne un risque de chute.
À l’heure actuelle, il n’existe aucune mesure de prévention sur la place du chien au travail, raison pour laquelle DoggyWorky crée des formations. Elles répondent à un besoin légal pour rassurer l’employeur. Ce dernier doit s’assurer que ses collaborateurs interagissent avec l’animal en toute sécurité pour continuer à travailler. L’objectif est aussi de vérifier que l’animal est compatible avec le milieu professionnel, et de sensibiliser les propriétaires sur leur engagement dans l’éducation du chien.
4. Comment se déroulent les formations chez DoggyWorky ?
DoggyWorky propose des formations e-learning adaptées au contexte professionnel. Ce sont des vidéos, avec des supports papier et des mémos. La durée varie d’une demi-heure à une heure et demie selon les formations. Chaque module dure 5 minutes pour être le plus pertinent possible.
Le programme a été fixé après de nombreux échanges avec des professionnels du secteur d’entreprise et du monde canin. Le secret de la pérennité de cette démarche est d’associer les deux, tant pour la performance de l’entreprise que pour le bien-être des salariés et de l’animal.
Enfin, en entreprise, nous connaissons la formation SST, « sauveteur secouriste du travail ». Avec le dog-at-work, il peut aussi arriver quelque chose au chien. C’est pourquoi DoggyWorky met en place une formation de « sauveteur secouriste chien au travail ». Notre idée est de former des personnes à isoler le chien des collaborateurs, à passer un appel de secours pertinent et à trouver les informations de l’animal à transmettre au vétérinaire.
© DoggyWorky
5. Quel est le type d’entreprise qui fait appel aux services de DoggyWorky ?
Nous proposons un accompagnement unique à chaque entreprise. Nous nous adressons aussi bien aux très petites entreprises (moins de 15 collaborateurs) qu’aux très grands groupes. Le tertiaire demeure majoritaire, mais il y a aussi des entreprises dans le BTP qui acceptent les chiens dans leurs sièges sociaux.
Nous accompagnons également des professionnels libéraux. Notre premier client est un kinésithérapeute basé à Lyon. Une certification DoggyWorky stipule que le propriétaire maîtrise son chien et qu’il y a un lieu où il peut être isolé, si besoin. Cela lui a permis d’être reconnu comme étant « le kiné au chien », et sa patientèle est en phase avec cette démarche. Certains patients viennent même avec leur chien !
6. On entend souvent parler du « pets at work ». Pourquoi privilégier l’expression « dog at work » ?
Les animaux de compagnie pouvant être acceptés sur le lieu de travail sont les chiens, les chats ou encore les NAC, comme les oiseaux. Pour ces derniers, nous ne pensons pas qu’il y ait vraiment besoin d’un accompagnement à l’heure actuelle.
En ce qui concerne les chats, l’étude s’est faite au démarrage. Nous pensons au bien-être des salariés : en France, il y a 3 fois plus de personnes allergiques aux chats qu’aux chiens. Mais la base de DoggyWorky est aussi d’assurer le bien-être animal en entreprise. Une comportementaliste félin nous a expliqué qu’une infime minorité de chats pourraient être compatibles avec le milieu professionnel. Néanmoins, le principe de DoggyWorky est de proposer un cadre uniforme pour tout le monde et d’homogénéiser une démarche. Pour l’instant, nous estimons que les chats ne sont pas compatibles avec le milieu professionnel, et nous assumons cette position.
Nous avons décidé d’accompagner le dog-at-work, parce que le bien-être animal a été le premier facteur. Placer un chat tous les jours dans une caisse de transport et le déposer dans une entreprise va à l’encontre du bien-être animal.
Nous croyons que le monde professionnel n'a jamais été aussi prêt à accepter les chiens, tout comme ces derniers n'ont jamais été aussi compatibles avec cet environnement.
Par Joséphine Voisart
Rédactrice Web
Après avoir suivi des études de lettres, Joséphine est devenue rédactrice web. Édition, lecture, écriture, animaux... Ce florilège de passions l’a fait tomber dans les pattes de Woopets ! Sensible à la cause animale, Joséphine a adopté une chatte répondant au nom d'Anthéa dans un refuge de sa région ; ainsi qu'une chienne, Lizzy, qui a vécu une vie de misère en Roumanie avant de rejoindre son foyer.
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