Entretien avec le Dr Laurent Bouhanna, fondateur d’Ophtavet : « J’ai voulu être vétérinaire dès l’âge de 5 ans »

Le Dr Laurent Bouhanna a fait de sa passion son métier. Après avoir obtenu son diplôme de vétérinaire, il s’est rapidement spécialisé en ophtalmologie. En 2022, il a réalisé son rêve en ouvrant une clinique de pointe, Ophtavet, dédiée uniquement à la santé des yeux de nos compagnons à 4 pattes. Désireuse d’en apprendre davantage sur son parcours, son métier et sa structure unique, l’équipe rédactionnelle de Woopets l’a interviewé.

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Pourquoi avez-vous choisi de vous spécialiser en ophtalmologie, et qu’est-ce qui fait que vous aimez tant votre métier ?

J’ai voulu être vétérinaire dès l’âge de 5 ans. Enfant, je me documentais énormément. Je regardais la série télévisée Daktari, collectionnais des photos d’animaux et créais des fiches synthétiques sur chaque espèce.

Après le bac, j’ai effectué une prépa véto avant d’intégrer l’École nationale vétérinaire d’Alfort. Une fois diplômé, j’ai exercé en tant que généraliste remplaçant pendant un an. Mais j’ai très vite ressenti l’envie d’aller plus loin dans un secteur spécifique, raison pour laquelle j’ai suivi une formation en ophtalmologie vétérinaire.

À l’heure actuelle, nous sommes seulement une quinzaine de spécialistes en France. En devenant experts dans un domaine, nous pouvons faire de la recherche, animer des conférences et publier des articles pour essayer de développer des techniques ou des traitements qui n’existent pas encore. C’est passionnant !

Cette voie, qui m’a immédiatement plu, m’a aussi ouvert les portes de la chirurgie. En ophtalmologie, j’opère des chiens et des chats tous les jours. Comme chez l’Homme, les actes chirurgicaux chez les animaux sont relativement pointus, mais rapides. Ils donnent tout de suite un résultat.

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© Ophtavet

Vous avez obtenu votre diplôme de vétérinaire il y a 30 ans, en 1994. Depuis, quels progrès majeurs avez-vous observés en médecine vétérinaire ?

L’évolution de la médecine vétérinaire a connu une véritable accélération ces 30 dernières années. Parmi les avancées notables en santé animale, citons la prise en compte de la douleur. Autrefois, l’Homme pensait que les animaux n’étaient pas sensibles. Les vétérinaires ne leur donnaient pas d’anti-douleur pendant ou après une chirurgie – ce que nous accomplissons systématiquement aujourd’hui !

À une époque, le taux d’échec, de mortalité ou de complications lié à l’anesthésie était également élevé. Au fil du temps, nous avons développé des produits anesthésiques, mais aussi le monitoring, c’est-à-dire la surveillance cardiaque et respiratoire au cours d’une opération. Ainsi, les accidents sont devenus rarissimes.

D’autres progrès techniques majeurs nous permettent d’exercer une médecine vétérinaire de pointe. Par le passé, les IRM, les scanners, la chimiothérapie et la radiothérapie n’existaient que chez l’humain. En ophtalmologie vétérinaire, nous utilisons désormais des lasers et des microscopes de plus en plus performants. De même, grâce à l’implantation de cristallins artificiels, l’animal voit beaucoup mieux qu’il y a 30 ans après une chirurgie oculaire.

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© Ophtavet

Vous avez fondé Ophtavet, une clinique vétérinaire basée au cœur de Paris. Qu’est-ce qui la distingue des autres établissements vétérinaires plus « classiques » ?

Chez Ophtavet, nous pratiquons uniquement l’ophtalmologie vétérinaire. Pour ce faire, nous utilisons les équipements de pointe de l’ophtalmologue, comme un OCT pour obtenir des images détaillées des structures de l’œil, 2 lasers afin d’effectuer des actes précis en chirurgie oculaire et des microscopes.

Nous possédons aussi du matériel moderne pour réaliser des diagnostics, tels que des tonomètres électroniques et un échographe oculaire haute fréquence. Des appareils aussi développés, variés et coûteux, ne peuvent que s’entrevoir dans une clinique spécialisée comme la nôtre.

Enfin, contrairement aux établissements généralistes, nous ne proposons pas certains actes vétérinaires à l’instar de la vaccination et de l’euthanasie. Il n’y a pas de chambre froide dans les locaux d’Ophtavet, ce qui est rare pour une structure vétérinaire.

Au sein d’Ophtavet, vous réalisez de nombreuses opérations oculaires (chirurgie de la cornée, de la cataracte, du glaucome…). Pouvez-vous nous exposer un cas clinique concret que vous avez abordé et résolu récemment ?

J’ai géré un cas pour lequel j’aurais agi de manière complètement différente il y a 10 ans. Le propriétaire d’un jeune Berger Australien m’a consulté après avoir remarqué qu’il se cognait de plus en plus, et que ses yeux devenaient blancs. La raison ? Une cataracte congénitale. Comme cette maladie le rendait progressivement aveugle, il a souhaité que je l’opère des 2 yeux.

L’intervention sur le premier œil s’est déroulée normalement. Lorsque je suis passé au deuxième, j’ai découvert un imprévu : une capsule complètement opaque, qui n’avait pas été détectée à l’échographie !

Quelques années plus tôt, soit je l’aurais laissée en ajoutant un cristallin artificiel et le chien aurait perdu quelques dixièmes de sa vision ; soit je l’aurais retirée et n’aurais pas mis d’implant par manque de support correct sur lequel le poser.

Grâce au matériel de pointe que nous possédons chez Ophtavet, j’ai pu ôter la capsule et insérer le cristallin artificiel. L’opération s’est révélée être plus complexe et plus longue que prévu.

Depuis que j’exerce le métier de vétérinaire, j’ai opéré des milliers de cataractes. Pourtant, chaque chirurgie s’avère différente et je dois toujours m’adapter au patient. Même après 30 ans de pratique, je continue d’apprendre et d’acquérir une expérience qui me fait progresser.

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© Ophtavet

Avez-vous une journée type, ou les imprévus sont légion ?

Quand je consulte mon planning la veille, je vois ce qui m’attend le lendemain. Toutefois, rien n’est jamais prévu à 100 % et je peux rencontrer des surprises. L’ordre des chirurgies, que nous définissons le matin même, peut changer au cours de la journée.

Chez Ophtavet, nous acceptons les urgences le jour même. Nous devons alors savoir rebondir, décaler une consultation ou une chirurgie, ce qui peut nous mettre en retard.

Personnellement, j’apprécie la gestion des urgences. Le temps compte, il faut agir sur-le-champ. En règle générale, nous obtenons un résultat immédiat, grâce au matériel de pointe que nous utilisons et à notre expérience.

Avez-vous des petits rituels, notamment lors des consultations ou durant les interventions chirurgicales ?

J’ai pris l’habitude d’opérer mes patients en musique. C’est le moment que je préfère dans la journée, car je suis extrêmement concentré. Aujourd’hui, l’être humain est constamment sollicité par le téléphone. J’ai toujours le mien dans la poche, et il m’arrive de répondre aux appels d’urgence durant les consultations. En chirurgie, je ne suis pas dérangé et je reste dans ma bulle.

En ce qui concerne les petits rituels à proprement dits, j’offre toujours une friandise à l’animal à la fin d’une consultation pour le récompenser. Je prends également le temps d’expliquer le diagnostic aux propriétaires, et je leur donne des fiches informatives sur la maladie de leur chien ou de leur chat. C’est important qu’ils quittent la clinique en ayant tout compris.

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© Ophtavet

Un article paru sur le site de la RTBF stipule que « le métier de vétérinaire interroge notre humanité ». Qu’en pensez-vous ?

Pour moi, c’est évident. Je le constate tous les jours à travers la relation que j’entretiens avec mes clients, et la place grandissante de l’animal dans notre société. Je mets un point d’honneur à la compassion envers les animaux, et à notre responsabilité vis-à-vis d’eux.

En effet, même si je pense que la vie humaine est prioritaire, il ne faut en aucun cas négliger l’animal. Au contraire, nous devons lui apporter du confort, prendre soin de lui et supprimer la douleur qui l’assaille.

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En tant que vétérinaires, nous avons des décisions importantes à prendre. L’euthanasie, par exemple – même si je ne la pratique pas – nous invite à nous poser les mêmes questions éthiques que celles concernant la fin de vie chez l’Homme.

Pour terminer cette interview, pouvez-vous donner 3 conseils fondamentaux dédiés à la santé des yeux aux propriétaires de chats et de chiens qui nous lisent ?

Les propriétaires d’animaux peuvent effectuer des petits soins quotidiens, comme nettoyer les yeux de leur chien ou de leur chat. Pour ce faire, ils peuvent utiliser un nettoyant oculaire vétérinaire adapté au pH des larmes de l’animal, voire un sérum physiologique. Ces produits permettent de retirer les saletés qui s’accumulent autour de l’œil.

Les personnes vivant avec des chiens brachycéphales, dont les yeux sont exorbités, peuvent appliquer un gel oculaire protecteur. Ce soin préventif quotidien crée une fine pellicule protectrice sur l’œil afin d’éviter certains problèmes de santé, comme une conjonctivite ou un ulcère. Ce sont des maladies que nous prenons souvent en charge à la clinique.

Enfin, je leur conseille d’observer régulièrement leur animal de compagnie. En cas de sécrétion anormale, de spasmes des paupières (douleur) ou de cognements (baisse de la vision), il convient d’agir au plus vite et de consulter un vétérinaire.

1 commentaire

  • sonia gouget a écrit : 06/11/23

    super d'être passionné par son métier, mais l'opération du cristallin est exorbitante donc les moins riches ne peuvent se permettre une telle opération et doivent laisser leur chien devenir aveugle...

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